Friday, April 27, 2012
Donne-moi de la lumière
Je suis tellement habituée au manque d'information de nos médias que quand j'entends une info, elle n'est déjà plus d'actualité nationale ou internationale -faut pas en demander trop- mais quand cela concerne quelque chose d'aussi simple et utile comme les réparations qui occasionnent des coupures de courants ou des pénuries d'eau potable dans certaines zones précises, ça me surprends. Je précise, au passage, que ce type d'informations -hautement importantes pour faciliter la vie des citoyens- est seulement transmise par la chaîne Habana. Lamentablement, depuis chez moi je n'arrive pas à la recevoir, et je suis obligée de la regarder quand je suis chez des amis.
Il y a quelque semaines j'ai entendu pour la première fois dans le journal une explication détaillée sur le manque d'eau dont, nous, habitants de La Havane, souffririons; surtout dans les quartiers du centre-ville et bien évidemment dans le Vedado, là où je vis. J'étais tout de suite contente, parce qu'on a été touché par tant de maux que le fait d'annoncer le manque d'eau potable qui durera un laps d'heures précises, se savoure. De manière générale, un jour, tu te lèves le matin et tu n'as ni gaz, ni eau, ni électricité, et tu ne sais pas pourquoi. Avec de la chance tu apprends, plusieurs heures plus tard, la cause de la coupure.
Je me suis préparée, bien sur, pour le lendemain et j'ai fait des réserves : des cubes à glaçons ornaient ma cuisine et ma salle de bain pour supporter de la meilleure manière possible l'absence du liquide vital. Cependant, au réveil, je fut surprise de trouver de l'eau dans l'évier, et au milieu de la matinée -que personne ne pense qu'à Cuba on ne peut pas être surpris- plus de lumière et ce jusqu'au lendemain matin. Je n'ai pas réussi à m'informer sur la cause de la coupure de courant, je suppose que ce ne sont pas les mêmes réparations qui supposément me priveraient d'eau. Enfin, je ne voudrais pas me lamenter de ne pas pouvoir écouter les informations concernant les choses qui nous manquent, je préfère le désordre de remplir des cubes à glaçons que d'acheter des bougies.
Traducteur Aïda
2 Julio 2011
Friday, August 19, 2011
Sunday, June 26, 2011
Un jour à l’étranger
Elle est arrivé à Cuba tombé amoureuse de la Révolution, à la fin des années soixante dix. Elle a épousé un général et elle s'est installée dans l'île paradisiaque, pour faire de ses rêves une réalité. Elle a toujours côtoyé des gens d'importance, la nomenclature comme on dit, et a vécu les trente dernières années comme une princesse. La perestroïka, la glasnost, la chute du mur de Berlin, puis l'effondrement du bloc socialiste elle a entendu comme un écho de la lointaine Europe, qu'elle avait sagement laissé derrière. De son domicile de Siboney elle a écouté la litanie de la Période spéciale, mais pendant qu'elle conduisait la Lada sur la Cinquième Avenue, les choses ne paraissaient pas si mauvaises. Bien qu'elle subit des pannes de courant pas souvent, elle a acheté un générateur, et comme toujours, son mari approvisionnait le garde-manger avec des produits d'importation. Les mêmes que toujours.
Elle s'était fait quelques amies, presque toutes du Parti communiste. Cependant, au début des années 2000 certaines étaient restées à Cuba et toutes avaient renoncé à leurs charges politiques et au Parti. La politique n'avait jamais été un sujet entre elles, mais la nourriture oui, et les crèmes, la plage et la bonne vie. Peu à peu la nécessité s'est emparée des dialogues : à qui cela importait-il, la mer bleue et le sable blanc de Varadero, s'il n'y avait pas d'oeuf pour mettre sur la table ? Mais cet animal de la discorde, la bête politique, n'allait pas la laisser seule.
Un jour j'ai décidé d'offrir à ses amies un jour spécial : plage, restaurant et hôtel. Elles sont sortis dès le matin et sont revenus tard dans la nuit. Quand on est descendu de la voiture l'une d'elles a dit satisfaite : merci pour ce jour merveilleux à l'étranger! C'était la dernière fois qu'on s'est vu.
Traducteur: Catherine F.
Publié en espagnol le 17 mai 2011
Tuesday, May 24, 2011
La Havane - New York
From Guama |
Le hasard, qui nous a placé un jour dans le même quartier, nous a séparés. Pendant des années, je n'ai pas eu de ses nouvelles et j'ai pensé, comme il est normal dans cette île, qu'elle était partie du pays. Il y a peu nous nous sommes retrouvées et j'ai pu vérifié qu'elle avait une raison: maintenant elle vit à New York et vient à Cuba pour les vacances. Je ne sais pas comment elle est partie, les Cubains s'arrangent de tant de façon pour sortir fuyant cette terre qui m'a déjà pris le travail de recherche, puisque les histoires peuvent être comiques, mais aussi très tristes et sinistres. De plus, j'avance un peu avec sensibilité sur le sujet de l'émigration, je me demande qui sera à mon côté dans dix ans, quand tous mes amis seront déjà partis.
Pendant l'instant que nous avons partagé, elle m'a raconté que là-bas elle travaillait beaucoup, et que d'une manière générale, elle se considérait comme communiste. Une communiste, me-suis exclamée? - si tu étais une terrible gusana. Qui t'a succédé? Le système des États-Unis - condamné - est inhumain, ici c'est mieux, plus humain. Je l'ai regardée bouche bée, le nouveau pays dans lequel elle vit ne lui plaît pas, parce qu'elle doit travailler, à Cuba elle ne le faisait pas parce que quelqu'un l'entretenait. Pourquoi justifie-t-elle par la politique sa propre incapacité productive ? Je ne suis pas d'accord avec toi - j'ai répondu en essayant de taire la passion qui m'envahit quand les gens viennent de la démocratie en me racontant des contes de fées sur la dictature - beaucoup de gens ne travaillent pas, c'est certain, parce que le salaire est "inhumain" et il n'est intéressant pour personne de courber l'échine gratuitement. Cependant, il me semble bien que, pour gagner son pain, tu dois travailler, c'est normal. Le Cubain n'aime pas travailler - j'ai riposté et alors j'ai su que parce qu'il ne lui plaît pas à elle de travailler, elle considère que c'est pareil pour le reste du peuple. Quelle capacité de généralisation!
Avant de nous séparer, elle m'a raconté qu'elle avait une opération en cours, j'ai supposé qu'elle serait à Cuba, puisque le gouvernement que nous avons est si humain. Quelle n'a pas été ma surprise de l'entendre s'exclamer: Je n'opère pas là-bas!
Traducteur: Catherine F.
Wednesday, May 4, 2011
Les mêmes noms
Le manque de rationalité me vient à l'esprit devant les images du Sixième Congrès. Quand j'entends la liste des délégués, les membres du Bureau Politique et ceux du Comité Central, je ressens un malaise physique désagréable : Machado Ventura, Balaguer, Cintas Frías, et un vieux etcétéra, ne me laissent pas continuer à écouter avec objectivité. Et comble de tout, Raúl Castro se met à raconter une anecdocte digne d'une telenovela (« feuilleton mexicain ») sur le machisme familial : il marche sur les pieds de Machado Ventura après qu'un certain ragot se soit propagé. Cette scène aurait été certainement plus adéquate devant le four d'une cuisine que pendant le tant attendu Congrès du Parti Communiste.
Le pire - ou le meilleur, selon la lecture - est que nous aurons à attendre jusqu'au 28 janvier 2012 pour la mise en application des changements. On supposait que le super changement serait pour tout de suite, mais ils nous ont donné une "petite modification" et à nouveau nous ont ajourné la "transformation". Raúl Castro se lamente sur des dogmes archaïques, promet une autre rectification, augure un avenir avec de plus jeunes dirigeants et assure qu'il sauvera lentement le socialisme et la révolution. Le Général sait, il doit le savoir, que ses promesses s'accompliront seulement quand il ne sera déjà plus dans le Comité Central, quand il ne sera plus le Premier Secrétaire d'aucun parti, quand vraiment une nouvelle vague de fonctionnaires publiques assumera les pouvoirs. Et justement c'est ça qu'ils veulent des puissants vieillards: minimiser le changement et jouer une politique de compte gouttes, pour étendre le plus possible l'inévitable changement, la fin de l'omniprésence du Parti.
Cependant, même moi, la reine de l'incrédulité, sens un certain optimisme. Les libertés économiques que le gouvernement cubain est aujourd'hui obligé de nous accorder, à risque de s'effondrer, ce seront les fondements de la liberté sociale et politique que nous leur arracherons demain, parce qu'alors ils seront également condamnés à céder, sous peine de périr.
Traducteur: Catherine F.
Publié en espagnol le 22 avril 2011
Sunday, April 24, 2011
Soldat, moi?
Chaque fois que je passe par 21 et Paseo cela me remue les tripes. Je traverse l'Avenue et je ne peux pas éviter de lire l'énorme affiche qui illustre ce post. Signée par la FMC, elle considère comme convenu que, moi, et toutes les femmes de cette île, sommes une espèce d'armée disposée à faire feu contre l'ennemi. Je ne suis même pas un soldat de mes propres causes, comment pourrais-je être celui des causes de la Fédération des Femmes Cubaines?
Cela me gêne énormément que les multiples organisations de masse, qui hypothétiquement représentent les différents groupes de cubains, se sentent en droit de parler au nom de tous, de voler les voix des individus pour les transformer en voix unique d'un appareil de contrôle. Pourquoi nous incitent-ils à un militantisme dont nous n'avons pas besoin ? Qui a dit que je ne suis pas une civile à outrance ? Depuis quand, nous, les femmes cubaines, formons un bataillon pour la défense de la patrie?
Traducteur: Catherine F.
Publié en espagnol le 19 avril 2011
Thursday, April 21, 2011
Le samedi
Depuis vendredi 8 avril le ciel nous annonce que la marche s'approche. Sous le précieux bleu, des avions de guerre essayent - nous ne savons pas bien comment ni pourquoi - de piquer vers la terre; nous nous sommes couvert les oreilles pour ne pas entendre le vacarme. Mes chiens ont perdu le sommeil, le mâle abboie désespérement au plafond et la femelle se cache sous le sofa. Je voudrais pouvoir leur expliquer que ce n'est rien de plus qu'un écran de vanité militaire dans un pays qui est fatigué de répéter au monde qu'il condamne la guerre. Je sors dans la rue et suis surprise de voir passer quelques chars devant mes yeux. Je traverse l'avenue 26 et respire profondément, c'est un fait: cette île est gouvernée par des fous. La circulation est détournée et les voitures perdues entre les rues forment un chaos. Je passe quinze minutes à essayer de traverser Paseo.
Cela fais dix jours que je vis en compte a rebours: plus que sept, plus que cinq, plus que finalement deux aujourd'hui. Je n'ai jamais été si désespérée par l'arrivée du dimanche. Dès vendredi, tout sera paralysé, les écoles, les commerces, la ville. Avec tant de besoin et tant de crise je me demande à combien de zéros se monte la note de frais de la mega marche pour le cinquantième anniversaire de la baie des Cochons.
Ils disent que nous, cubains, sommes paranoïaques et, sincèrement, si nous ne l'étions pas bien mal serions-nous, parce qu'il n'y a rien qui donne plus le frisson que de se montrer au balcon et voir à un peloton de soldats crier des gros mots et donner des coups de pied au sol, ni plus sombre qu'une armée mobilisée en temps de paix, ni plus irrationnelle de sortir les hommes de leur travail pour mobiliser plusieurs fois par an les réserves. Rien de plus triste que cette semaine, qui nous rappelle sans piété que ce n'est pas la guerre de tout le peuple, mais la guerre contre tout le peuple.
Traducteur: Catherine F.
Publié en espagnol le 15 avril 2011